Rénovation énergétique : étude sur les conséquences du nouveau DPE

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L’objectif du nouveau DPE est d’accélérer la rénovation énergétique des logements. Malheureusement, sa mise en œuvre ne se fait pas sans heurt et menace d’être lourde de conséquences.

Cette nouvelle version du diagnostic passe en effet d’un document à caractère informatif à un ensemble de mesures coercitives qui laissent entrevoir une mutation profonde du marché immobilier. Nous avons effectué une étude auprès des porteurs de projets immobiliers afin de compléter notre approche empirique. Les résultats confirment nos observations et sont pour le moins inquiétants.


Les résultats de l’étude portant sur le DPE

Une nette tendance se dégage :

Le DPE, un dispositif connu

  • Le DPE est bien inscrit dans le paysage immobilier français puisque plus de 9 personnes sur 10 connaissent le dispositif ;

  • 8 personnes sur 10 savent qu’un nouveau DPE a vu le jour en juillet 2021.

Un futur très compliqué pour les logements mal classés

  • Pour plus de 8 personnes sur 10, le classement DPE aura une incidence sur un futur achat ;

  • Près de 8 personnes sur 10 renonceraient ainsi à l’achat d’un logement mal classé au DPE.

La rénovation énergétique n’attire pas

  • Près de 6 personnes sur 10 sont réticentes à engager de lourds travaux de rénovation énergétique ;

  • Près des deux tiers rejettent l’idée de perdre des m² à cause d’une isolation intérieure ;

  • Plus de 8 personnes sur 10 connaissent la future interdiction de location pour les logements énergivores ;

  • Seulement 1 personne sur 4 déclare connaître l’existence d’aides financières.


L’interprétation de ces résultats au regard de la politique de rénovation énergétique

Les résultats de cette étude confirment notre approche empirique du marché de l’achat immobilier (résidence principale ou investissement locatif). Le DPE commence à peser très sérieusement sur les biens les plus mal classés.

Les acquéreurs deviennent de plus en plus sensibles au critère énergétique pour moult raisons :

  • Les logements nécessitant des travaux importants rebutent la majorité des acquéreurs. Car la rénovation énergétique exige des travaux lourds (isolation thermique intérieure ou extérieure, changement de fenêtres, mise en place d’une VMC, etc.) auxquels s’ajoutent les travaux de décoration ;

  • Les acquéreurs ne veulent pas de factures énergétiques qui explosent. Dans certaines régions, le montant des factures énergétiques devient supérieur à celui du loyer ou du crédit immobilier en cours de remboursement. Les acheteurs s’orientent alors directement vers des biens plus efficients ;

  • La conscience écologique. Contrairement à une idée reçue, ce n’est pas un critère sélectif majeur. La fibre environnementale demeure un luxe pour la majorité des acquéreurs, ces derniers étant plus sensibles aux montants des factures énergétiques ainsi qu’aux travaux qu’ils souhaitent éviter à tout prix.


Faute de rénovation énergétique, des millions de logements risquent de sortir du parc immobilier

Étant donné l’avenir sombre qui se dessine pour les biens les plus mal classés au DPE, on se dirige, selon toute vraisemblance, vers une crise du logement inédite. Différents scénarios sont alors possibles si aucune mesure corrective n’est apportée à ce nouveau DPE et, plus globalement, à la politique de rénovation énergétique.

Le marché de la résidence principale

On commence déjà à assister à une scission du marché. D’un côté, les biens les plus efficients séduisent rapidement, au prix demandé. De l’autre, les passoires énergétiques ont du mal à convaincre pour deux raisons :

  • Certains bien anciens, même rénovés ne présentent pas le moindre intérêt : mal situés, bâti quelconque, copropriété déjà problématique, etc. Ils offrent des perspectives plus qu’incertaines à la revente. Conséquence directe : ils n’attirent pas ;

  • Les prix ne sont pas encore ajustés à cette nouvelle réalité. Les acquéreurs étant de plus en plus vigilants, certains biens ne pourraient se vendre qu’en contrepartie d’une baisse de 40 à 50%, voire plus. Sans cette correction tarifaire, ils sont, pour l’heure, et à périmètre constant, exclus du marché.

Dans certaines zones tendues, on assistera à un marché d’exception qui n’en restera pas moins dangereux pour les acquéreurs. Le principal risque réside dans un prix d’acquisition trop élevé interdisant de fait la réalisation de travaux, cette opération n’étant pas rentable ramenée à la valeur du bien.

Paris est clairement concerné par ce marché d’exception. Considérant la typologie du marché parisien, un logement classé E au DPE fait figure de bien vertueux. Pourtant, les prix affichés à la vente sont aux antipodes de critères dits rationnels et vous exposent à un retournement brutal du marché le cas échéant… avec toutes les conséquences dommageables que vous pouvez imaginer. À méditer.

Le marché de l’investissement locatif

Le marché locatif risque d’être encore plus durement touché par le nouveau DPE. Beaucoup d’investisseurs l’oublient en phase d’acquisition, mais le critère principal de la rentabilité d’un bien, c’est le locataire. Sans locataire, un bien d’investissement ne vaut rien. C’est exactement ce qui va se passer pour les logements visés par les mesures coercitives du DPE.

Le coût des travaux de rénovation énergétique grèvera toute rentabilité, sauf si le prix de vente est nettement revu à la baisse.

Les bailleurs actuels font face à plusieurs possibilités :

  • Réaliser les travaux nécessaires et voir leur rendement locatif fondre comme neige au soleil ;
  • Inclure les travaux dans une stratégie de déficit foncier ;
  • Vendre à un prix largement inférieur à leur prix d’acquisition ;
  • Conserver le bien et ne rien faire ;
  • Conserver le bien et le laisser vacant.

Bailleurs comme locataires seront victimes de cette politique de rénovation énergétique à marche forcée.


Pourquoi la politique de rénovation énergétique est tout sauf viable ?

Comme nous l’avons déjà souligné dans notre dossier consacré au nouveau DPE, deux chiffres nous ramènent à la dure réalité :

  • Selon la mission d’information parlementaire portant sur la rénovation thermique des bâtiments, environ 70.000 rénovations globales sont réalisées chaque année. Ce chiffre rejoint le débunkage effectué par Médiacités quant au chiffre annoncé de 650.000 logements financés par le dispositif Ma Prime Renov en 2021. Les rénovations énergétiques globales représentent seulement 8% des dossiers financés, soit légèrement plus de 50.000. Comme nous l’avions déjà calculé, il faudrait, à ce rythme, plus de 100 ans pour rénover les logements qualifiés de passoires thermiques. Plus d’un siècle.

  • Les parlementaires ont interrogé des experts, dont monsieur Dominique Naert, Diecteur du Master « Bâtiments durables » au sein de l’École des Ponts ParisTech. Page 77 du rapport, ses propos sont édifiants : « À productivité inchangée, il faudrait donc passer de 1,9 millions de professionnels à quasiment le double ».

On peut discuter de tout sauf des chiffres.

L’ambitieux programme de rénovation énergétique multiplie les lois et les objectifs, mais ne dispose d’aucuns moyens derrière. C’est le vide sidéral. La triste réalité.

Vous doutez peut-être du chiffre de rénovation globale annuelle et de sa capacité à être augmenté ? Relisez la loi de transition énergétique (2016) pour la croissance verte (LTECV). Page 13, trois objectifs sont présentés pour le secteur du bâtiment :

  • Accélérer la rénovation énergétique des logements. Objectif : 500.000 rénovations lourdes annuelles, avec une priorité donnée au traitement de la précarité énergétique. À cette époque, les rénovations énergétiques globales étaient de l’ordre de 50.000 chaque année ;

  • Renforcer les performances énergétiques des nouvelles constructions. Tous les bâtiments sont tenus de s’aligner sur le standard bâtiment basse consommation (BBC) en 2050 ;

  • Créer des emplois : 75.000 emplois seront créés grâce aux travaux engagés. Or, il faudrait environ 1,9 millions de professionnels supplémentaires afin d’atteindre les objectifs de rénovation énergétique…

En 2022, rien n’a changé. Le rythme des rénovations lourdes évolue toujours dans un tunnel compris entre 50.000 et 70.000 réalisations annuelles. Plusieurs lois sont passées par là et, sur le terrain, aucun changement ne pointe à l’horizon. Quant au besoin de recrutement et de main-d’œuvre, on en est toujours au même point, à savoir qu’il faudrait organiser la filière…

Seuls changements notables ?

  • L’argent public dilapidé moyennant de piètres résultats en retour. Ce n’est bénéfique ni pour la planète, ni pour les factures des ménages. Principal fautif, le morcellement des travaux ;

  • Le morcellement des travaux, justement, peut créer des pathologies dans le bâti qui s’avèrent nuisibles et dangereuses pour la santé des occupants ;

  • Non seulement ça ne résout pas le problème du logement des personnes, mais c’est la tendance inverse qui se profile à l’horizon.

Quelles actions faudrait-il engager pour atteindre les objectifs de rénovation énergétique ?

Réaliser la rénovation énergétique de 500.000 logements (ou plus) est un défi logistique de taille. Il convient de réfléchir en amont à une industrialisation de la démarche :

Organiser et assurer l’approvisionnement. Or, le secteur du bâtiment est de plus en plus exposé aux problèmes d’approvisionnement. Le défi consiste donc à s’assurer que les matériaux ne manquent pas ;

  • Processus d’industrialisation et de simplification à destination des petites entreprises qui effectueront les travaux. C’est ce que les experts préconisent car la massification n’est possible que si les processus de rénovations sont simples à assimiler et à exécuter ;

  • Ne pas faire du label RGE le Saint Graal pour les entreprises. La qualification des entreprises est une chose, la labellisation en est une autre. Les arnaques à l’isolation à 1€ démontrent qu’une entreprise peut être labellisée tout en se révélant incompétente, voire malhonnête. Il faut libérer le marché, sous la surveillance de référents régionaux (agents publics et/ou privés) ;

  • Changer de paradigme et baser la nouvelle politique énergétique sur l’adhésion plutôt que sur la répression ;

  • Compter sur la liberté et la responsabilité individuelle. Chacun doit être libre d’effectuer les travaux qu’il souhaite, au moment où il le souhaite.

Autre impératif, une grande simplification en matière d’organismes et d’aides diverses et variées. Les résultats de notre étude nous le rappellent : seulement 1 personne sur 4 connaît l’existence d’aides financières.


Comment composer avec ces éléments dans le cadre de votre projet immobilier ?

Nous avons déjà évoqué la stratégie à mettre en place. Il est important d’acheter au juste prix le logement que vous convoitez. Pour un bien nécessitant une rénovation énergétique, le coût des travaux doit vous permettre de rester dans les prix du marché, une fois le bien rénové.

Le cas des copropriétés

S’il est complexe d’étudier la rénovation énergétique d’un logement individuel, l’opération s’apparente à un vrai casse-tête dans le cas d’une copropriété.

Outre les difficultés techniques proprement dites, le montage financier pour chaque copropriétaire est une usine à gaz. Comme certaines aides dépendent des ressources des copropriétaires, calculer le reste à charge de la quote-part des travaux pour le syndic est impossible.

Si la copropriété est bien gérée, il faut compter 3 à 4 ans, au minimum, avant le lancement du chantier. Le temps nécessaire pour :

  • Choisir un maître d’œuvre ;
  • Étudier les solutions techniques ;
  • Réaliser un montage financier pour la copropriété et pour chaque copropriétaire ;
  • Établir un cahier des charges ;
  • Choisir les entreprises de rénovation ;
  • Déposer les autorisations administratives ;
  • Assurer le suivi opérationnel des travaux, qui peuvent durer plusieurs mois à plus d’une année selon la taille de la copropriété.

Quel type de logement choisir ?

Si vous souhaitez faire l’acquisition d’un logement à titre de résidence principale, acquérir un logement mal classé au DPE peut s’envisager, si et seulement si le prix d’achat vous permet d’effectuer les travaux de rénovation énergétique adéquats.

Dans le cas contraire, il semble plus prudent de balayer les incertitudes en vous orientant sur des biens classés A à D.

Pour les investissements locatifs, le critère financier pèse encore plus lourd dans la prise de décision. Fuyez les passoires thermiques et concentrez-vous sur les biens les plus efficients. Une prise de risque peut s’avérer payante dans le cas de logements avec travaux, mais sera réservée à des investisseurs avertis.


En résumé

Peut-être vous demandez-vous pourquoi Immo Pop adopte une posture favorable à la redéfinition de la politique de rénovation énergétique ?

La raison est très simple. La transparence a toujours été, et sera toujours, notre marque de fabrique. Nous souhaitons vous communiquer tous les éléments vous permettant de prendre une décision éclairée.

Nous saluons les politiques ambitieuses en matière de logement et de protection de la planète, mais elles se doivent d’être réalistes, ce qui n’est pas du tout le cas à ce jour. Notre devoir de conseil et notre déontologie ne sont pas de vagues concepts dictés par une politique marketing destinée à amadouer nos clients. Notre philosophie est invariable : vous informer sur les risques qui pèsent sur votre projet d’achat (ou sur votre projet de vente) dans le seul but de vous épargner une catastrophe financière et des situations dramatiques. Tout simplement.

Même si le nouveau DPE n’est qu’un détail dans cette politique de rénovation énergétique, ses conséquences peuvent déclencher une crise du logement sans précédent.

Il est impératif de définir un moratoire sur son application et de tout remettre à plat. La rénovation énergétique est une chance à saisir ; elle ne doit pas se transformer en naufrage massif.

Parlez-nous de vos projets immobiliers, nous vous montrerons comment les réaliser.



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